Avant l’an 528, le village de Saint-Prest se nommait Saint-Jean-sur-Eure.
A cette époque, l’évêque de Chartres, Ethère, fit construire un édifice accolé au flanc sud de l’église paroissiale comportant un « martyrium », pour y recevoir les restes de saints martyrs (légende de Saint-Prest) qu’on déposa dans dix sarcophages.
Les reliques les plus honorées étaient celles d’un certain Priscus ; à la suite de nombreux miracles, la paroisse prit le nom de Saint-Prest.
L'église
L’église actuelle a pour crypte l’abside de l’église carolingienne du IXème siècle, celle-ci ayant succédé à un sanctuaire du VIème.
Accès à la nef du XIIème, coté ouest, par un joli portail roman, taillé dans une belle pierre calcaire, surmonté d’une triple archivolte à dents de scie et encadré par deux colonnettes à chapiteau. A droite, un visage serait celui d’Eve, et à gauche apparaîtrait le serpent tentateur.
L’église mesure 39 m sur 9,80 m, elle est éclairée par 18 fenêtres en style roman de transition.
Les vitraux sont l’œuvre de Charles Lorin, maître-verrier à Chartres, de la fin du XIXème.
Dès l’entrée, le visiteur est saisi par l’unité et la chaleur données par les boiseries Louis XVI qui garnissent la partie basse des murs, surmontées par les lambris de sapin verni posés en partie haute pour masquer les méfaits du salpêtre.
La charpente de châtaignier est supportée par dix entraits, dont les six premiers finissent en monstres marins.
Le chœur date du XIIIème.
Le maître-autel, de style baroque à l'époque de Louis XIII (XVIIème), est encastré dans un retable à colonnes cannelées, aux motifs évoquant la vigne.
Au dessus de l’autel, trois tableaux :
Une huile sur toile réversible avec des fleurs et une croix de Malte sert d’antépendium (fin XVIII). Il fut inscrit à l’inventaire des Monuments historiques le 1 décembre 2006 et restauré par décision du Conseil municipal du 22 février 2008.
Quatre statues haut placées, d’époque Renaissance, en bois peint, ont malheureusement perdu leur polychromie d’origine :
Les vitraux du chœur représentent de gauche à droite :
Un vieux meuble, attribué à l’époque de Louis XII, sert maintenant d’autel pour les offices.
La chaire (1883), le banc-d’œuvre (1887) et le tambour (1890) ainsi que la porte (1893) sortent des ateliers de M. Malenfant, de Charonville. Sur les panneaux de l’escalier de la chaire, sont sculptés les lettres S P entrelacées, et les armoiries du pape Léon XIII ; sur la cuve, les attributs des quatre évangélistes ; sur le dossier, la statue du Christ enseignant ; enfin, à l’abat-voix, une colombe symbolise l’Esprit-Saint ; au dessus, un ange sonne de la trompette.
Dans le tympan du fronton du tambour, domine en souveraine la statue de Notre-Dame de Sous-Terre.
Le chemin de croix est dû à M. Marcille, de Oisème.
Sur le flanc nord, la sacristie forme la base du clocher.
Elle semble être du XIVème, avec ses trois grandes fenêtres ogivales géminées.
Jolies statues de sainte Marguerite et saint Jean.
La cloche (1531), une des plus anciennes d’Eure-et-Loir, fêlée depuis la Révolution, a retrouvé sa voix grâce à un marteau qui vient la frapper sans risque de compromettre l’équilibre du clocher fragilisé.
Dans le tympan du fronton du tambour, domine en souveraine la statue de Notre-Dame de Sous-Terre.
Dans l’église est précieusement protégé, le bâton de la Saint-Vincent de la confrérie du même nom qui aurait été constituée en 1774 à Saint-Prest.
Saint-Vincent, patron des vignerons, était célébré dans tous les villages viticoles de la région de Chartres. On le promenait en procession à travers les vignes lors de la fête de la Saint-Vincent le 22 janvier.
En haut de ce bâton, on voit une statuette du saint qui tient un verre d’une main et une bouteille de l’autre. Il était vendu chaque année aux enchères par le curé et le dernier enchérisseur en avait la garde et en assumait le port à l’enterrement des frères de la confrérie (dissoute en 1905).
Le bâton de la Saint-Vincent, patron des vignerons, est transporté hors de L'église à chaque fête des vendanges de La Vigne de Saint-Prest.
Visites de la "Vigne de Saint-Prest" au 69 rue de La République pendant les Journées européennes du Patrimoine.
La chapelle
La chapelle fut construite au XIIIème siècle, pour permettre aux fidèles d’approcher aisément les tombeaux. Peu à peu mutilés, brisés, ceux-ci disparurent, excepté celui de saint-Prest, dans lequel, en 1664, on rassembla tous les ossements. On rehaussa alors le pavage d’environ 60 cm. En 1679, le chanoine Hoyau fit mettre les reliques dans deux châsses en bois peint. Sur celle de saint Prest, sont peints les douze apôtres, saint Jean-Baptiste et un évêque.
La chapelle était alors séparée de l’église par un mur, elle était en contre-bas de l’église, d’environ 1,90 m. En 1841, le mur fut abattu et la chapelle comblée jusqu’au niveau de la nef.
Sur le mur de gauche, on peut admirer une Vierge à l’Enfant en pierre du XIVème. En face, un saint Jean-Baptiste en bois polychrome du XVIème. Les trois fenêtres montrent des vitraux de Charles Lorin, représentant le martyr des compagnons de saint Prest, la décollation de saint Prest et la translation des reliques.
Des polychromies ont été découvertes en 2018. Leur datation permet de conclure à l’existence de 4 périodes décoratives : le XIIIème et le XIVème siècles, le XVème ou XVIème siècle pour la représentation du soldat ci-contre et le XVIIIème pour une litre armoriée (restauration en 2019).
Vestiges polychromes découverts lors de travaux dans la chapelle : décor figuratif d’un grand soldat.
La légende de Saint-Prest
Vers l’an 270 de notre ère, Saint-Prest, Priscus, noble chrétien de Besançon, s’était réfugié avec quelques-uns de ses coreligionnaires, dans les forêts de l’Auxerrois, pour fuir les persécutions de l’empereur Aurélien.
L’empereur apprenant qu’un rassemblement de chrétiens s’était formé près d’Auxerre, et craignant une révolte dans les Gaules, dépêcha, pour le combattre, Alexandre avec une légion romaine.
A cette nouvelle, les chrétiens se retirèrent dans la forêt de la Puisaye, à six lieues d’Auxerre, où ils furent atteints par les Romains.
Ayant fait profession publique de leur foi, Priscus et ses principaux compagnons furent massacrés et leurs corps furent jetés dans un puits
Saint-Prest avait eu la tête tranchée : un de ses compagnons, appelé Cotus, échappé aux mains d’Alexandre, recueillit le chef du saint et l’emporta à des lieues au-delà d’Auxerre, où il fut rejoint par ses persécuteurs et immolé à son tour.
Ces reliques restèrent cachées pendant près de 150 ans ; ce ne fut que sous le pontificat de Saint-Germain, évêque d’Auxerre, qu’elles furent découvertes par ce vieux prélat ; il fit bâtir en 444 un monastère et une église pour les recevoir à Toucy (ou Coucy) appelé le couvent des Saints en Puisaye, sur le lieu même où avaient été martyrisés Saint-Prest et ses compagnons. Une autre église fut également fondée à Saint-Bry, lieu où fut retrouvé le chef de Saint-Prest. Elle est encore maintenant le but d’un important pèlerinage.
Les religieux de Puisaye, craignant le passage des troupes de Clovis à travers la Bourgogne, partirent pour Orléans, emportant leurs reliques, puis vinrent près de Chartres et s’arrêtèrent sur les bords de l’Eure à l’endroit appelé la Roche.
Au moment où ils allaient retourner dans leur monastère, après la fin des guerres, Ethère, évèque de Chartres eut une vision :
Saint Prest lui apparut en songe et lui ordonna de déposer son corps et celui de ses compagnons dans l’église du lieu où ils se trouvaient pour l’instant et qui était alors dédiée à saint Jean-Baptiste.
Ethère partit sur-le-champ, et ayant trouvé les moines bourguignon, il leur fit part des intentions qui lui étaient suggérées par le miracle céleste.
Les reliques furent transportées jusqu’à l’église dans une chapelle basse qui fut édifiée au côté droit de l’église et qui porta le nom de « chapelle des corps saints »
En effet, outre le corps de saint Prest qui y fut exposé à la vénération des fidèles, plusieurs reliques de ses compagnons y furent vénérées notamment saint Andoche ou saint Audevoir qui a laissé son nom à une fontaine située à la Roche près de l’Eure.
La légende du pays raconte qu’un ossement de ce saint tomba par mégarde dans la source et lui donna un pouvoir miraculeux pour guérir la phtysie (tuberculose).
Ce sont ces reliques des saints aujourd’hui encore contenues dans deux châsses et le tombeau en pierre de saint Prest (contre 10 grands tombeaux qui disparurent lorsque la chapelle des corps saints fut comblée en 1841.)
Le martyr de Saint-Prest
Là, ils s’arrêtèrent à un lieu nommé Saint-Jean-sur-Eure, auprès d’une fontaine, et furent reçus dans une maison hospitalière où ils déposèrent leur religieux trésor. Deux miracles furent opérés aussitôt. Une femme qui allait périr en mal d’enfant fut heureusement délivrée, et un prêtre du lieu fut guéri subitement d’une affection goutteuse dont les médecins avaient désespéré.
Les moines Auxerrois ne pensaient pas à se fixer en ce lieu et espéraient retourner dans leur monastère sitôt la guerre cesserait. Mais Dieu manifesta d’autres desseins. La nuit qui suivit l’arrivée des religieux, Saint-Prest apparut au bienheureux Ethère, évêque de Chartres, et lui dit : « Levez-vous, mon frère ; rendez vous promptement à l’endroit où sont déposées nos reliques, et préparez-nous-y un lieu de repos. »
-Et qui êtes-vous seigneur? répondit l’évêque
-Je suis Priscus, qui ai choisi un lieu non loin de votre ville, auprès de votre fleuve ; là vous trouverez des serviteurs de Dieu qui sont arrivés hier avec nos cendres.
Dès le matin, l’évêque raconta cette vision à son clergé et au peuple de la ville ; il se transporta à Saint-Jean-sur-Eure et trouva les choses comme il lui avait été dit. Le saint pontife fit creuser un oratoire adjacent à l’église, et y ensevelit les sacrés restes dans dix tombeaux de pierre. Le corps de Saint-Prest fut mis dans un tombeau plus grand que les autres, et sa tête fut conservée à part dans une urne.
Depuis ce temps, la paroisse prit le nom de Saint-Prest et Saint-Jean n’en fut plus que le second patron. La fête du saint martyr fut fixée, pour tout le diocèse de Chartres, au 16 octobre, anniversaire de l’arrivée des reliques ou de la translation des Reliques.
La Fontaine Saint-Audevoir
La fontaine près de laquelle elles avaient été déposées d’abord, continua d’exciter la dévotion des fidèles. Le peuple l’appelle fontaine de Saint-Audevoir ou de Saint-Andoche, du nom d’un des compagnons de Saint-Prest, selon quelques auteurs, et, selon d’autres, du nom d’un saint religieux qui habitait en ce lieu et qui reçut les moines lorsqu’ils arrivèrent avec leurs Reliques.
Cette fontaine est toujours visitée ; et Dom Georges Viole remarque qu’il y avait affluence surtout le Vendredi saint. Les mères ne craignant pas d’y plonger leurs enfants.
Extrait de « Notice historique sur les Reliques de Saint-Prest » : Bréviaire de Chartres -Apothec.moral - Lectionn. de Saint-Père - D. Georges Viole - Cartulaire de Notre-Dame - Procès-verbaux…
La Fontaine Audevoir a disparu aux environs de 1920. Une margelle et une garniture de puits « rustiques » mais d’un type non-conforme à la tradition locale se trouvait tout près du moulin de la Roche, à quelques mètres du cours de l’Eure. On disait que ce puits était alimenté non point par la rivière, mais par le ruissellement des côtes voisines. Il était peu profond. Cette petite fontaine fut réputée miraculeuse. On y plongeait les enfants qu’on disait atteint de « maladie de langueur ». D’ailleurs la coutume d’y plonger les enfants fut interdite à plusieurs reprises par le Préfet d’Eure-et-Loir.
L’eau de la Fontaine Saint-Audevoir était potable : les meuniers et les cultivateurs voisins y puisaient pour leurs besoins ordinaires.